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Jacques Brianti
31 août 2009

André Benedetto

Vendredi 10 juillet, à 18h30, André Benedetto a joué dans la dernière création de sa troupe, « lettres anonymes d'aujourd'hui »... trois jours plus tard, il mourait, la veille de son anniversaire, il aurait eu 75 ans le 14 juillet....

C'est mon ami Juju (Juliac) qui m'a appelé pour m'annoncer cette funeste nouvelle, nous n'arrivions pas à conclure cette conversation. Silence

J'aime la conduite de nuit, j'y bâtis bien souvent mes projets, je tourne mon film la nuit. L'univers clos de l'habitacle qui bouge m'amène dans le vagabondage... chacun son truc. Cette nuit de transversalité du Sud, parcours qui m'est si familier, fut une drôle de traversée, je me rendais aux obsèques d'André, tristesse et rage, rage parce que je m'étais promis de le voir cette fin d'août, voulant achever un travail entrepris, ou du moins achever, parfaire, le travail esquissé avec lui lors de notre rencontre du 9 octobre 2008. Travail en suspens, que je mènerais à son terme prochainement. Et ce jour, la place des Carmes qui faisait discrètement son remplissage, des amis retrouvés, des connus, des anonymes que j'aimerais revoir. Il y avait presque plus de 10 ans que je n'avais pas mis les pieds « en Avignon » le temps du festival ! De mon parking au Théâtre des Carmes je pus mesurer la densité théâtrale de ce fief investi par la profession, dans toute sa diversité. La place des Carmes, elle, avait encore cette allure d'îlot. Le Monde du 15 07 le dit si bien, ou si naïvement, sorte d'aveu d'un regard porté à la « province »comme ils disent : Cela fait un drôle d'effet à Avignon. Au coeur du Festival s'en va une figure de la vie locale, engagée... » je n'ai pas en mémoire le nom de la dernière personnalité de notoriété théâtrale confirmée décédée à Paris à qui l'on décernerait ce titre de «  figure locale » Peu importe, je préfère l'hommage de Jean-Luc Porquet dans le Canard ! Faites votre choix.

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Jacques Brianti                

à Bernard Lubat, pour la journée hommage à André (Uzeste, août 2009), à laquelle je ne serais malheureusement pas présent, amitiés à tous.

 

La presse a évoqué la « disparition d'André ». Des pages plutôt louangeuses... Un homme de cette trempe ne disparaît pas... son oeuvre considérable va forcément grandir. La lucidité de regard qu'il portait sur notre monde, ses misères, ses espoirs aussi, nous oblige aujourd'hui à porter sa parole au mieux et nous avons le devoir de faire savoir ce qui a été dit et écrit par ce poète agissant, jaillissant!

   Ce que n'a pas voulu relever  une partie de cette presse, qui bien souvent ne s'éveille que pour les morts.... mais comment pouvaient-ils savoir, ceux qui ne sont là qu'un court instant de l'été, combien André était présent dans un territoire qui ne se limitait pas à Avignon, voire à la place des Carmes, espace dans lequel certains ont bien voulu le limiter... Un jour force fut pour quelques uns de reconnaître au minimum qu'il y avait en Avignon un «  Hommedethéâtre ». Certes il tint un rôle important dans la Cité, mais n'oublions pas que cette expérimentation, il la revendiqua comme un possible pour d'autres villes. Il fut un infatigable voyageur, traverseur immérite de ce grand Sud..

   Partout où il y avait débat et mouvement, je l'ai connu en 1965 à Pau, il est passé par ici, et par là...

avec Emballage et Xercès dans ses bagages et bien d'autres, au Larzac avec l'ami Félix Castan, qu'il ne faudrait pas oublier.... c'est encore frais, à Montauban bien sûr... à Uzeste cela allait de soi, à Arles...

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Je n'évoque que les lieux où j'allais. Mais aussi l'épopée vécue de la revue Mêlée de Bordeaux à Marseille Nice via Toulouse..., récemment à Larrazet. Mais ce qu'il me plait de dire et me paraît nécessaire de rappeler c'est l'homme d'écoute, il ne fut pas qu'un débatteur avec des gens autour. Il savait aller à « l'intime » pour en savoir plus disait-il...On ne se voyait depuis plus de quarante ans que dans ces rencontres de confrontations ou d'apports artistiques et échanges variés, pas toujours très calmes, souvent solidaires, toujours riches, nos relations se limitaient à cela. Il m'est arrivé de travailler en équipe, d'avoir aussi conduit des démarches collectives, cela est connu j'ai même eu des cartes de parti, de syndicat, de «  président » d' assos. J'ai toujours craint l'enrôlement malgré soi, qui conduit bien souvent à l'aveuglement! Laisser une porte ouverte... Je crois qu'il savait cela. Aussi j'ai toujours eu un pied un peu en dehors ou du moins à coté.... Un jour, il n'y a pas si longtemps,  il m'a appelé, j'ai toujours aimé ses appels, car dans le peu qu'il disait,  cela allait toujours très vite et surtout à l'essentiel, «  j'ai reçu ton catalogue! je viens voir cette exposition! ». Il fit les cinq cents kilomètres, avec Frances, certes on se connaissait de longue date, mais le jour passé à l'Escaladieu au coeur de l'exposition restera un grand  moment d'échange, cela ne peut être peint et ne sera pas transcrit ... les vraies rencontres demandent parfois du temps!... Quelques jours après il me sollicita pour que j'assure une présence plasticienne à l'occasion de la lecture de Zone Rouge qu'il comptait faire pour la  « commémoration » du Che, ce qui fut fait (à ce sujet il y a un travail en préparation, je devais le voir ; nous devions en parler... Ce travail se fera, prochainement...).

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   Il était de bon ton dans le microcosme de dire qu'il en faisait un peu trop, d'aucun pensaient qu'il bâclait un peu les choses... il faut avoir eu entre les mains une « conduite »; par exemple celle qu'il me proposa, avec cette écriture d'instit... pour apprécier la précision et l'attention qu'il portait à la mise en espace de ce qui était une rencontre atypique et à risque... avec les rajouts en bouts de lignes : tu verras, comme tu le sens....etc.  Et sur place, la vitesse de ses décisions. La mobilité de l'intelligence.

Je conclurais en me remémorant le soir où nous allâmes  promener son chien, il sut me parler de ces vies derrière ces clôtures, il connaissait son « village » parce qu'il aimait les humains. Nous avons parlé de nos parcours, un peu de nos fatigues. C'est lui qui aborda « la solitude du peintre » mais il conclut : au fond, toi et moi nous sommes des regardeurs, mais pour nous c'est compliqué car nous avons devoir d'agir! Voilà c'est compliqué, mais il faut le faire!

  Marie-Anne l'avait vu en réunion et sur scène, après son bref séjour en Bigorre, elle me confia après son départ, il est beau et il a l'air bon. La chose est dite, bordel on a bien le droit d'être bon

Jacques Brianti

Pouzac le 20.08.09

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IMG_4817Avignon, juillet 2009, place des Carmes

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